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Interview croisée Alice im Wolleland & Knitty and Woolly se dévoilent - Partie 2


On se retrouve pour la partie 2 de notre interview croisée ! À l’occasion de la sortie de notre modèle de bonnet Azun goes to Berlin, Alice et moi avons souhaité vous en dire plus sur nous et nos entreprises respectives, et sur notre vision de la laine et du tricot telle qu’elle nous guide au quotidien.




Comment avez-vous rencontré l’univers du tricot et de la laine ?


Fanny : J’ai appris le tricot de ma grand-mère paternelle, lorsque j’étais enfant. J’ai tricoté de façon plus sporadique une fois adolescente et je m’y suis remise de façon assez addictive il y a quelques années. Je trouve beaucoup de réconfort et de satisfaction à créer des pièces sur mesure que je peux porter ou offrir. Je me suis déjà constitué une belle garde-robe dont je ne suis pas peu fière et qui me permet d’être auto-suffisante. C’est par ailleurs une activité que je trouve très relaxante et que l’on peut pratiquer n'importe où. 

Pour moi, le tricot, c’est associé à la laine. Le synthétique ne m’a jamais attirée. Si on revient deux générations en arrière, la laine était omniprésente : dans les matelas, les vêtements…mes parents ont plein d’histoires à raconter à propos de la place de la laine dans leur enfance. Et puis, entourée de brebis comme je l’étais, ça n’en était que plus naturel.


Alice : J’ai appris à tricoter avec ma grand-mère et ma nounou quand j’étais enfant. J’adorais (et j’aime toujours) toutes les activités créatives et naturellement, j’ai voulu apprendre à manier les aiguilles à tricoter. Après une pause à l’adolescence, j’ai repris le tricot avec une amie pendant mes études et découvert la communauté tricot internationale via les réseaux sociaux et Ravelry. Depuis, je ne me suis plus jamais arrêté de tricoter. Au fil de mes années de pratique du tricot et de mes convictions personnelles, j’ai commencé à m’intéresser de plus près à la production textile, et principalement la filière laine en Europe et en France. La traçabilité, le local, la préservation de terroirs et de traditions, le respect des personnes, des animaux et des paysages sont des principes qui sont complètement intégrés à ma pratique du tricot et que je souhaite transmettre via mon entreprise.



Quel genre de laine aimez vous tricoter et pourquoi ? A quoi faites vous particulièrement attention quand vous achetez/sélectionnez de la laine?


Fanny : Les laines que j’apprécie le plus sont les laines cardées naturelles, avec des couleurs végétales ou au moins produites selon des modes de production respectueux de l’environnement le plus possible. Pour moi, la laine doit être authentique et raconter une histoire. Ce qui m’importe également, c’est de connaître l’origine de la laine et son parcours jusqu’à la pelote. Une production locale, de la transparence sur son mode de production et une laine naturelle (c'est-à-dire qui n’a subi aucun traitement chimique tels que le carbonisage, le blanchiment ou un traitement superwash) sont mes critères de choix. C’est de cette façon que j’ai conçu mes premières gammes de fils Azun et Peira.


Alice : Avec Fanny, nous partageons la même vision à ce sujet et c’est aussi ce qui nous a rapproché. J’aime les laines qui ont une histoire, qui sont ancrées dans un territoire et qui sont respectueuses des personnes, des animaux et de l’environnement à chaque étape de leur production. Quand je choisis des laines, aussi bien pour mon stock personnel que pour mon entreprise, j’aime écouter et comprendre d’où vient cette laine, qui l’a produite et quelles sont les étapes de transformation. 




L’origine géographique de la laine et de sa transformation semble avoir beaucoup d’importance pour vous deux. Pouvez-vous expliquer en quelques mots pourquoi ?


Fanny : En grandissant, j’ai cherché à en savoir davantage sur la production des fils en laine et je n’y ai pas trouvé mon compte. Je ne comprenais pas que l’on puisse importer autant de laine d’Asie, qui plus est provenant d’élevages de moutons qui pratiquent le mulesing, alors que la France est un incroyable producteur de laine de part le nombre d’élevages. D’ailleurs, la majorité de la laine produite en France est soit jetée soit envoyée en Asie pour y être transformée, ce qui n’a pas vraiment de sens. En relocalisant la transformation, on encourage des entreprises locales désireuses de relancer la filière laine. La qualité n’en est que plus grande. On remet l’artisanat et les savoir-faire à l’honneur et en plus, on valorise des races de brebis aussi diverses que variées. Cela permet aussi de remettre les éleveurs dans la boucle et de les rémunérer au juste prix (car rappelons- le, aujourd’hui encore dans la majorité des cas, le prix d’achat de la laine en suint reste inférieur au prix de la tonte, ce qui représente une perte pour l’éleveur qui travaille dur sur une année entière avant chaque tonte). 


Alice : Avant de créer Alice im Wolleland et de vivre à Berlin, j’ai beaucoup déménagé et étudié l’allemand et les politiques européennes, notamment les politiques transfrontalières et locales au sein de l’Union européenne. Cela m’a évidemment beaucoup fait réfléchir sur les questions de consommation, de l’industrie, des territoires, des habitudes de consommation, de l’environnement ou encore du travail. Il me semblait logique que ces réflexions et convictions soient liées à ma pratique du tricot. J’ai alors mené des recherches sur la filière laine en Europe et après en être arrivée aux mêmes constats que Fanny (problèmes environnementaux, de rémunération, une pelote qui fait le tour du monde, maltraitance animale…), j’ai décidé à mon échelle de soutenir celles et ceux qui s’engagent pour faire (re)vivre la filière laine en France et en Europe, de partager mes connaissances à ce sujet et, via mes cours et ateliers, de faire un travail de pédagogie à ce sujet.




Vous proposez toutes les deux des laines dites de pays ou rustiques. Pourriez vous décrire les spécificités de ces laines ? Ces laines nécessitent elles un entretien particulier ?


Fanny : je propose en effet de la laine des Pyrénées de races de brebis lourdaises et tarasconnaises. Ce sont des brebis dites rustiques, c'est-à-dire bien acclimatées à leur environnement et peu exigeantes. Elles sont nourries principalement avec du foin en hiver ou de l’herbe lorsqu'elles sont dans les estives pendant l’été. La laine sert à les protéger des intempéries et du froid, ce qui donne à la laine ses caractéristiques. Les laines de brebis lourdaises et tarasconnaises sont toutes deux très gonflantes, de couleur écrue en majorité (certaines brebis sont noires, mais c’est très rare), et les fibres sont assez longues, ce qui est idéal pour réaliser du fil. Ces laines n’ont certes pas la finesse ni la douceur du mérinos, mais elles ne piquent pas pour autant et donnent en revanche des fils bien plus solides. Pour produire les fils Azun et Peira, j’ai scrupuleusement trié les toisons pour ne sélectionner que les meilleures fibres et éviter le poil et le jarre, des fibres grossières et piquantes. C’est pour ça que ce travail doit être fait en détail à la main. Cela prend beaucoup de temps, mais le résultat en vaut la peine. Bien sûr, on a toutes et tous notre propre sensibilité à la laine, mais en se réhabituant à porter des fibres naturelles, on rééduque aussi notre épiderme jusque-là un peu trop habitué aux matières synthétiques ultra douces. 

Pour ce qui est de l'entretien, le principe est simple : la laine étant autonettoyante, pas besoin de laver nos tricots souvent, 1 fois ou 2 par an suffisent. Pour en savoir plus à ce sujet, j’ai écrit un article de blog dédié à l’entretien des tricots en laine naturelle.


Alice: Je ne produis pas moi-même ma laine comme Fanny mais mon objectif est de faire découvrir des laines originales, respectueuses de l’environnement, des animaux et des personnes et issues de différentes régions de France. J’ai à cœur de présenter des laines que j’appelle “de caractère” et qui s’éloignent du schéma “tout mérinos, le plus doux possible”. C’est un grand travail de pédagogie car nous sommes très habitués aux matières très douces (et très souvent synthétiques) et à pouvoir tout mettre à la machine à laver. Lors de mes cours, je passe du temps à expliquer comment entretenir ces laines non-superwash et à expliquer qu’il n’y a pas besoin de laver ses tricots toutes les semaines (oui oui, une fois par an suffit ;)). J’argumente aussi souvent que si on est capable d’investir 80h pour tricoter un pull à la main, alors il est aussi possible de passer quelques minutes par an pour le laver à la main. Et si vraiment, on veut tenter la machine à laver, alors, je conseille de tester d’abord avec un échantillon - il y a des laines non superwash qui passent très bien en machine (sans essorage par contre!). 



On se retrouve très bientôt pour la partie 3 !

A bientôt

Fanny & Alice






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